Bernadette Malgorn | Le blog personnel

QUELLE BRETAGNE DANS UN MONDE OUVERT ?

PARTIE 13
Quels projets collectifs ?

Les projets collectifs qui ont réussi sont ceux qui se sont concentrés sur les besoins prioritaires de la communauté en question. Ces projets peuvent se traduire par des investissements de long terme, mais si leur nécessité et la satisfaction des besoins sont suffisamment perceptibles par la population, ils emporteront l’adhésion.

C’est ce qui a fait la force de la construction européenne à ses débuts. La création de la Communauté européenne du charbon et de l’acier, la CECA, en 1951, permettait la remise en marche des industries lourdes et exigeantes en capitaux à la base de la reconstruction de l’économie de six pays dévastés par la guerre. L’Euratom prenait acte de la nécessité de diversifier les sources d’énergie et de rendre l’Europe moins dépendante. Quant à la Politique agricole commune, l’un de ses objectifs était de nourrir des populations qui avaient été victimes de privations pendant les quatre années du conflit et les cinq années de rationnement qui ont suivi. Nul ne contestait alors l’agriculture intensive.

Le développement de l’action de l’État a su également dans l’après-guerre se concentrer sur les missions dont le caractère prioritaire était reconnu par tous. En 1945, le grand défi a été de loger les populations qui retrouvaient leurs habitations détruites ou endommagées. Une vaste entreprise de reconstruction y a pourvu en reconstituant aussi les équipements publics indispensables à la vie collective : des administrations ont été créées pour mener à bien ces programmes. La création de la sécurité sociale répondait aussi à un besoin de solidarité dont les fils traditionnels avaient été distendus par la guerre. Dans la période qui suivit, les années soixante et soixante-dix, les pouvoirs publics ont dû faire face à de nouveaux enjeux : l’exode rural, l’urbanisation ; l’industrialisation ; puis les chocs pétroliers qui accélérèrent le programme nucléaire. A chaque fois, l’objectif politique fixé, l’appareil administratif s’est mis en place.

Les régions, à leur naissance en 1972, ont su, le plus souvent, s’attaquer aux problèmes prioritaires handicapant leur développement. Cela a été aussi le cas pour la Bretagne. Forte des annonces du général de Gaulle, la région s’est investie dans son désenclavement en apportant une contribution décisive au plan routier breton.

Les crises, le chômage massif, les reconversions industrielles, l’effondrement du bloc de l’Est qui ont marqué la période suivante n’ont pas donné lieu à la même clarification des priorités de l’action publique. Face à ces nouveaux enjeux, l’État, plutôt que de hiérarchiser différemment ses missions, a transféré celles qu’il considérait comme moins stratégiques, laissant le soin de la remise en ordre à des collectivités qui n’étaient pas au départ outillées à cette fin.

MALGORN Bernadette, « Quelle Bretagne dans un monde ouvert ? », in Association Bretonne 2014, Nantes 141e Congrès, Tome CXXIII, pp 217-232, Atelier Liv’Edition, 2014